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Participer au Parlement étudiant du Québec : entrevue avec Mia Bellemare

Auteur·e·s

Florence Claveau-Roy

Publié le :

14 février 2024

Introduction

Dans un monde où les Google, Apple, Facebook, Amazon et Meta – les GAFAM – prennent le contrôle de nos pensées, où l’avenir du journalisme est menacé par le sous-financement et la perte de confiance, où certains gouvernements affirment haut et fort leur volonté de se détacher des droits de la personne, où des élu.e.s banalisent les propos misogynes et racistes contre des groupes marginalisés, un groupe de jeunes québécois.e.s préoccupé.e.s par l’avenir de la démocratie se réunit d’année en année à l’Assemblée nationale pour prendre part au Parlement étudiant du Québec (PEQ), une simulation parlementaire qui s’érige en véritable rempart contre l’inquiétant désintérêt politique des jeunes au Québec. Entretien avec une étudiante de la Faculté ayant pris part à la plus récente édition de cette simulation, Mia Bellemare.

Les discours sont présentés comme des pièces de théâtre, et les débats sont animés avec des arguments à la fois forts et absurdes.

Portrait

Mia est née dans la Ville de Québec, où elle a grandi et étudié jusqu’à ce que sa pratique du ballet classique l'amène à déménager à Montréal. C’est en fréquentant le Collège Marianopolis que Mia a entamé son engagement citoyen de manière sérieuse. Par l’entremise d’un ami, elle s’est intégrée progressivement à une aile jeunesse politique provinciale. Cette implication l’a amenée à prendre conscience d’une foule d’enjeux sociaux et à vivre plusieurs expériences liées à la politique internationale. C’est d’ailleurs cette implication dans une aile jeunesse politique qui l’a poussée à participer à une simulation parlementaire.


Parlement Étudiant du Québéc

Le PEQ est une simulation parlementaire partisane qui a lieu annuellement lors de la première semaine de janvier à l’Assemblée nationale du Québec. Il s’agissait cette année de la 37e législature de cette simulation à laquelle ont participé dans le passé des politiciens comme Mathieu Lévesque et Pascal Paradis. Le PEQ établit deux partis : les Bleu.e.s et les Rouges. Chacun des partis doit défendre une idéologie. Les Rouges représentent les valeurs de la droite traditionnelle, soit l’anarcho-capitaliste, qui prône la méritocratie et le libre choix. Les Bleu.e.s forment la gauche communiste, préférant un important filet social, un État tentaculaire et l’abolition de la méritocratie. Dans cette simulation, les participants ne joignent pas nécessairement le parti qui reflète leurs convictions personnelles, ce qui mène à des débats forts et parfois loufoques. On peut donc y observer de fiers représentants de QS qui embrassent temporairement la position conservatrice des Rouges. Autrement dit, un.e admirateur.rice de Gabriel Nadeau-Dubois peut être forcé.e de militer pour l’abolition des taxes le temps de cet exercice démocratique fictif.


La simulation est découpée en deux périodes pour permettre à chaque camp d’occuper les chaises du gouvernement et de l’opposition officielle. Cette année, ce sont les Rouges qui ont commencé au pouvoir pour éventuellement céder leur place aux Bleu.e.s. Chaque parti au pouvoir doit présenter des projets de loi fidèles à leur idéologie. Le parti de l’opposition peut amender les projets de loi du gouvernement. Cette année, les Rouges ont notamment défendu un projet de loi visant à légaliser le travail pour les mineurs (à partir de l’âge de 10 ans). Selon l’idéologie des Rouges, les jeunes méritent de travailler et de contribuer à l’économie québécoise. Un projet de privatisation de toutes les écoles du Québec a également été mis de l’avant, comme la privatisation de la police et l’abolition du mariage. Les Bleu.e.s, quant à eux, ont entre autres cherché à abolir toutes les voitures pour faire régner le transport en commun. Le PEQ permet donc d’imaginer des projets de loi qui ne pourraient fort probablement pas se transposer dans la réalité, mais qui permettent d’imaginer un Québec complètement différent de ce qu’il est.


Le PEQ cherche à recréer le plus fidèlement possible le quotidien des élu.e.s de l’Assemblée nationale. Chaque journée de simulation met donc en scène un lot de déclarations ministérielles et une période de questions et de débats sur des enjeux de fond. Chaque parti au gouvernement est également confronté à une situation de gestion de crise fictive lors de la première soirée au pouvoir. La mise en place d’un caucus journalistique fait également partie du scénario de la simulation. Le PEQ produit deux journaux qui défendent chacun une idéologie aux deux pôles de l’échiquier politique. Ces journaux relatent les évènements de la simulation parlementaire en demeurant fidèles à leurs idées respectives. Cette expérience s’approche de ce que vivent chaque jour les journalistes de la Colline Parlementaire à Québec.


On l’aura compris, le PEQ se veut une représentation fidèle du quotidien des élu.e.s de l’Assemblée nationale, si bien que les rôles officiels y sont reproduits. Le parti au pouvoir nomme un premier ministre, qui est chargé de nommer les haut.e.s placé.e.s du Cabinet ministériel comme le Whip, la vice-première ministre, le président de Caucus et le leader parlementaire. Le Cabinet des ministres de chaque camp est composé, dès l’automne précédant la tenue du PEQ, en fonction des compétences dans le domaine ministériel en question et de la performance oratoire. C’est ainsi que Mia a été chargée du Ministère des Relations internationales et de la Francophonie cette année, ministère surnommé « Bonjour-Hi », lors de ces cinq journées de simulation. En effet, le caractère loufoque de la simulation s’étend aux noms donnés aux ministères. On a pu voir dans le passé l’équivalent du Ministère des Transports prendre le nom de ministre des tchouchous et des vroumvroums. Il y a donc un brin d’absurdité dans ce noble exercice d’introduction aux rouages du pouvoir politique au Québec.


Prendre la parole et se faire confiance

La simulation permet aux participants d’endosser les rôles tant au gouvernement qu’à l’opposition. La durée de cinq jours contribue à l’intensité de l’expérience, reproduisant fidèlement l’horaire parlementaire. Au cours de cette période, les camarades du caucus deviennent une sorte de famille, favorisant des relations fortes malgré les opinions politiques divergentes. L’ambiance oscille entre le sérieux et le loufoque. Les discours sont présentés comme des pièces de théâtre, et les débats sont animés avec des arguments à la fois forts et absurdes. Cette immersion permet le développement d’argumentaires exceptionnels et crée une dynamique où des liens forts se tissent avec des individus aux points de vue différents.


Bien qu’initialement intimidée et ressentant un fort sentiment d’imposteur avant son engagement dans le PEQ, Mia reconnaît aujourd’hui que cette expérience a été un catalyseur majeur pour renforcer sa confiance en elle et développer des qualités de leadership. Mia demeure à ce jour portée par le sentiment de valorisation ressenti après avoir prononcé un discours et participé à des débats au Salon bleu, partageant la même scène que ses personnalités politiques préférées qui ont marqué le Québec contemporain. Elle considère désormais les camarades avec qui elle a partagé cette expérience comme des membres de sa famille et des contacts précieux pour l'avenir, quel que soit le domaine choisi.


Mia tenait à faire connaître le PEQ à la population étudiante de la Faculté de droit. Elle souligne également que, cette année, la moitié du caucus des Rouges était composé  d’étudiant.e.s en droit et de juristes. Convaincue que cela n’est pas un hasard, Mia reconnaît que le fait d’avoir entamé des études en droit permet de mieux comprendre les rouages des pouvoirs exécutif et législatif. Elle encourage chaque étudiant.e passionné.e par notre démocratie et notre système politique à participer à une telle simulation, d’autant plus que nous évoluons dans un domaine essentiel à la construction de notre société, de notre monde commun.


*Processus pour faire partie du PEQ : Chaque participant.e du PEQ doit se faire recruter par un membre du caucus. Les participant.e.s du PEQ doivent être âgés de 18 à 25 ans. Mia est ouverte à parrainer des étudiant.e.s intéressé.e.s à participer à la prochaine édition. Vous pouvez la contacter à l’adresse suivante : mia.k.bellemare@umontreal.ca

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