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Traffic lights, dashboard cameras, action!

Auteur·e·s

Michael Kowalsky

Publié le :

28 août 2023

D’un point de vue architectural, à l’intérieur de chaque salle de cinéma, il y a des rideaux : le fil conducteur de cette édition du Pigeon Dissident. Comme ma chronique est axée sur le transport, plus précisément sur le cyclisme, et encore plus spécifiquement sur la messagerie à bicyclette, j’ai choisi trois longs métrages notoires sur la messagerie à vélo dans le but d’en rédiger un commentaire, une sorte de mini analyse comparative cinématographique. J’explore, dans l’article qui suit, le rapport entre la loi et les messagers à bicyclette dans les films Quicksilver, Deux secondes et Premium Rush. Comment le messager est-il interpellé par la loi? Quelles lois? Et quel genre de normativité?

J’ai travaillé comme messager à bicyclette pendant près d’une décennie et en ce moment j'entreprends un mémoire de maîtrise sur les conditions de travail des coursiers à bicyclette à la Faculté de droit. Mon objectif est de réaliser une analyse du point de vue juridique en lien avec mon expérience en tant que coursier.

Un mot, en passant, sur mes qualifications. J’ai travaillé comme messager à bicyclette pendant près d’une décennie et en ce moment j'entreprends un mémoire de maîtrise sur les conditions de travail des coursiers à bicyclette à la Faculté de droit. Mon objectif est de réaliser une analyse du point de vue juridique en lien avec mon expérience en tant que coursier. Certes, le cinéma est un médium populaire, et si les films nous dépeignent (nous, les messagers, les cyclistes) comme des voyous, comment cela influence-t-il la perception que Monsieur-Madame tout le monde a de nous dans la réalité?


À toute vitesse (Quicksilver en anglais) États-Unis. Kevin Bacon - 1986

Un courtier boursier après avoir perdu sa fortune familiale et sa compagnie lors d’un échange catastrophique sur les marchés, change son occupation et devient coursier à bicyclette à San Francisco. La montée d’adrénaline qui accompagne la vente à haute pression est mise en parallèle avec celle de la descente à haute vitesse d’une côte de San Fransisco. Dépourvues  d’effets spéciaux et de casques protecteurs, les scènes de trafic routier dépeignent un danger réel et semblent ignorer toute préoccupation pour la sécurité au travail. L’absence de casque donne un mauvais exemple au public. Le film se déroule durant l'apogée de la messagerie, avant l’invention du courriel. À ce moment-là, il était encore possible de gagner sa vie en faisant ce métier. La fameuse scène des concours de ‘trick’ (ex. : fancy cycling) me rappelle des moments similaires de camaraderie entre mes collègues de travail, pendant les journées tranquilles au centre-ville ou lors de soirées conviviales d’été où la compétition amicale était au programme.


Deux secondes. Québec. Charlotte Laurier - 1998

Une cycliste de montagne professionnelle prend sa retraite et commence à faire de la messagerie à Montréal. Comme dans Quicksilver, le film met en scène une réorientation de carrière. Laurie, le personnage principal, est plongée dans un univers où elle doit faire preuve de force physique et mentale comme femme dans un milieu de travail typiquement dominé par des hommes. Le rapport qu’elle développe avec son mécanicien est réaliste : le mécanicien ou le fournisseur de pièces est indispensable pour quelqu’un qui roule du lundi au vendredi.


Les autres coursiers se révèlent un peu sexistes et fermés à l’idée qu’une cycliste professionnelle « retraitée » joue du coude simplement pour être considérée à égalité parmi eux. Ce n’est plus autant le cas, car plusieurs coopératives féminines émergentes rayonnent à travers le monde grâce au réseau *BMA (www.wbma.com). Les outils et les ressources existent pour appuyer des pratiques qui alimentent et encouragent l’inclusivité de toutes les expressions de genre dans le domaine de la course à vélo..


Premium Rush. États-Unis. Joseph Gordon-Levitt - 2012

Un coursier expérimenté à Manhattan (qui détient un baccalauréat en droit de la prestigieuse Université Columbia) reçoit un message maudit. Cela déclenche des poursuites avec un ripou, soit un policier corrompu et joueur compulsif qui voudrait intercepter l’enveloppe qui contient le numéro gagnant d’un tirage au sort illicite lié au monde interlope. Il s'agit d’un film hollywoodien rempli de scènes de poursuites exaltantes et d’effets spéciaux spectaculaires. Le coursier pédale à travers des feux rouges et joue au chat et à la souris avec un autre policier à vélo, mais il arrive à livrer l’enveloppe à l’heure.


Comment sommes-nous censé.e.s comprendre le rôle du vilain principal de ce film s’il est un policier corrompu? Ce film pourrait-il être considéré comme un précurseur du mouvement« Defund the police »? La relation entre  la normativité de la route (le code de sécurité routière) et la réalité des cyclistes est mal adaptée Après tout, les piétons ont le trottoir, les chauffeurs ont la rue, et les cyclistes n’ont nulle part.


Le public, en étant exposé à des représentations de coursiers sexistes et délinquants, intègre parfois ces images stéréotypées. Les cyclistes qui ne suivent pas les règles sont plus remarqués que les automobilistes qui dépassent quasiment tous·tes la vitesse maximale sur l’autoroute et dans les zones scolaires. Comment adoucir l’image du coursier criminel? Le coursier à bicyclette est, selon un certain sondage, une des professions les plus détestées parmi les politiciens et les portiers. Un coup de pédale à la fois, on espère changer cette image. Peu importe le transport que vous empruntez, on espère, comme d’habitude, que vos lumières soient vertes.

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