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On va s’aimer encore

Auteur·e·s

Sophie Gagnon

Publié le :

14 février 2024

J’écoute cette chanson de Vincent Vallières en boucle, le cœur serré. J’aimerais tant me livrer à l’écriture sans trop réfléchir, sans peser mes mots, sans me retenir. À quoi ressemblerait un tel texte ? Aurait-il la rigueur journalistique à laquelle j’aspire ? Ai-je le droit de partager mes propres expériences alors qu’il y a des enjeux plus importants qui se doivent d’être discutés ? D’ailleurs, je n’ai jamais écrit un texte à la première personne. C’est ce « je » que j’évite depuis que je me suis lancée dans la rédaction de chroniques pour le journal étudiant.

Je dois te laisser aller. Mais comment ? Par où commencer ? Je m’en veux de ne pas avoir fait les choses différemment. Et si je regrette ma décision ? Pire encore, si je ne trouve personne d’autre ? Suis-je à blâmer?

Pour cette édition, je me donne donc le défi d’écrire du cœur.


Malgré les séparations que j’ai vécues dans ma vie – celle de mes parents ou encore lorsque mes sœurs ont quitté la maison – celle-ci est bien différente. Tout récemment, un garçon est venu chambouler ma vie (insérer un petit pincement au cœur ici). Je vous épargne les détails, mais ce fut une belle histoire. Courte, certes, mais qui me semblait être vouée à l’éternité. Je n’avais d’yeux que pour lui. Force est d’admettre : j’étais en amour pour la première fois !


Comment décrire quelque chose qui ne se définit pas vraiment. Que l’on peut difficilement placer dans le temps ou l’espace, encore moins mesurer. Qui va à la fois dans tous les sens, mais tend aussi à se concentrer. Comme des poussières suspendues, sans direction, qui s’agglutinent naturellement pour former un noyau. Soudés, nous formions une planète, un monde en entier. Et dans toute cette ampleur, une intimité. C’était doux et léger. C’était du bon café, des parties d’échecs, des conversations stimulantes et l’occasionnel baiser volé. Toutes ces choses, autrefois étrangères, que j’affectionnais désormais comme quotidien.


Mais toutes ces chansons mélancoliques n’y sont pas pour rien. Cet amour qui brillait jadis sous le soleil chaud de l’été s’est perdu dans les étoffes de coton de nos manteaux d’hiver. Les maux doux.

Que s’est-il passé ? Voilà la grande question. Sans trop entrer dans les détails, je crois que nous étions peut-être trop… différents. Ne vous méprenez pas, la différence peut être bonne, en fait, elle l'est. Mais certaines choses doivent s’aligner. S’équilibrer. Et notre réalité était tout autre. Quand je construisais un pont, tu érigeais un mur et je devais me donner des ailes pour voir par-delà de tes remparts. Tu es le roi de ta forteresse. Mais là-dedans, tu es aussi prisonnier et bourreau. Je ne peux pas faire tomber ces murs, alors je fais demi-tour, maintenant. L’équilibre est rompu.


Je dois te laisser aller. Mais comment ? Par où commencer ? Je m’en veux de ne pas avoir fait les choses différemment. Et si je regrette ma décision ? Pire encore, si je ne trouve personne d’autre ? Suis-je à blâmer ? Une avalanche de questions auxquelles je n’ai pas la moindre réponse. Je n’aime pas l’incertitude et tu es la chose la moins certaine au monde.


Que me reste-il, en fin de compte ? Rien ? Faux. Aussi difficile que cela puisse être de l'admettre, et même si je me sens seule, il me reste quand même ce « je ». Celui que j’ai tendance à reléguer aux oubliettes et qui cherche toujours à s’échapper, se négliger. Voilà une tendance que j’aurais intérêt à inverser. Ne devrait-elle plutôt pas se prioriser ? C’est bien, après tout, la première personne.


Tout compte fait, je me sens reconnaissante. D’avoir eu la chance de vivre quelque chose de bon et d’en avoir profité. De m’être posé les bonnes questions en restant fidèle à moi. D’avoir eu le courage d’aimer sans garantie de recevoir cet amour en retour. Alors, je n’ai pas d’amertume ni de regrets. Ce qui est parti au vent, j’en ferai des cerfs-volants. Avec l’esprit au repos et le cœur léger. Je t’ai aimé.


Pour moi, écrire, c’est immortaliser quelque chose de passager. Se faire la promesse de ne pas oublier. Alors, je me fais cette promesse.


On va s’aimer encore.

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