
Les méandres d’une démocratie étudiante - Retour sur l’Assemblée générale
Auteur·e·s
Wang-Lyne Tchotanin
Publié le :
30 septembre 2022
Le 28 septembre à midi, je programmais dans mon calendrier Google un bloc d'une heure pour l'assemblée générale d'automne de l'AED. Oh, my sweet summer child.
On pourra débattre longtemps de la procédure, du manque de préparation de la proposition du CEFDUM, mais ce qui laisse un goût amer dans la bouche de plusieurs, c’est l’attitude adoptée dans les échanges.


Que de beaux mots
Sur la proposition d'amendement au paragraphe 53 m) des règlements généraux l'AED, le débat dura presque une heure, estimation conservatrice. Alors qu'il y a moins d'une semaine, les étudiantes et les étudiants de la Faculté de droit de l'Université de Montréal votaient presque à l’unanimité en faveur d'une levée de cours, mesure symbolique, quoique nécessaire, pour assister à la Marche pour le climat, on a eu droit cette fois à beaucoup plus d'opposition de la part du même corps étudiant.
La proposition, qui émanait du vice-président à la vie étudiante, était appuyée de données statistiques provenant du GIEC sur l'impact des GES produits par l'élevage et la consommation de viande. L'idée de l’amendement était donc d’étendre le règlement qui imposait déjà les mets végétariens dans les évènements de l’AED et des comités à tous les évènements organisés par ceux-ci, qu’ils les financent ou non.
Sans surprise, les objections provenaient majoritairement des comités, formant environ 110 des 130 participantᐧeᐧs, qui exprimaient leurs craintes quant aux événements hors campus financés par des cabinets, et la difficulté d'imposer une telle mesure. Les exécutantᐧeᐧs ne voulaient pas créer de conflits, trouver de nouveaux traiteurs si tardivement ou comme l'a dit un intervenant : "mordre la main qui les nourrit". Des appréhensions tout à fait légitimes, si ce n'était de la vive réassurance de l'AED qu’elle allait leur venir en aide et gérer ces situations avec ou même pour eux, sans compter la période de grâce de trois mois. D'autres intervenantᐧeᐧs ont aussi fait valoir leur point de vue, attirant davantage l’attention sur la valeur d’une mesure concrète pour la protection de l’environnement.
Après plusieurs propositions d’amendement à l’amendement battues, celle qui fut adoptée peut laisser perplexe ‒ le statu quo est presque maintenu, et les comités ne seront tenus d'offrir un menu végétarien que pour les évènements qu’ils organisent sur campus, financés ou non par eux, pratique déjà bien établie dans la coutume de la Faculté.
Mais ce résultat ne pouvait être inattendu : avec une salle remplie de nouveauxᐧelles exécutantᐧeᐧs attendant patiemment d’être officiellement éluᐧeᐧs, accompagnéᐧeᐧs d’autres membres de leurs comités, il va de soi qu’ilsᐧelles aient plaidé et voté en faveur de leurs intérêts. Et pour cela, on ne peut les blâmer. On n’avait qu’à venir en plus grand nombre…
Décorum
C’est après un rapide changement de salle, en raison de la manie des futurᐧeᐧs juristes à vouloir toujours plus débattre (et il faut m’inclure), que nous combattons la fatigue intellectuelle pour parler de budget, encore.
Pour ceux et celles qui n’étaient pas là, et qui bien sûr seront présentᐧeᐧs à la prochaine AG, le CEFDUM proposait, pour compenser l’absence d’activités d’accueil et du carnaval en 2020, de redistribuer une partie du budget qui aurait été allouée à cela aux étudiantᐧeᐧs de troisième année sous la forme d’un rabais sur le prix du billet de bal. Controverse. Ça brasse au niveau des étudiantᐧeᐧs de troisième année, qui semblent pouvoir se faire convaincre de la mesure, au niveau des étudiantᐧeᐧs de première année, qui veulent au contraire conserver le surplus créé par la pandémie, mais surtout au niveau de la trésorerie, qui ne veut manifestement pas modifier le budget.
On peut penser que cette réticence de la part du trésorier était injustifiée : un comité qui change d’idée, ce n’est pas nouveau. Ce que les gens dans la salle ne savaient pas, par contre, c’est que le déficit autorisé du CEFDUM avait été matière à discussion à partir de la fin juillet jusqu’à l’après-midi avant l’AG, et jamais l’idée du financement additionnel n’avait été abordée. Du côté du CEFDUM, toutefois, l’idée d’aller chercher une certaine équité intergénérationnelle ne leur est venue que deux jours avant l’AG en conversant avec des étudiantᐧeᐧs de troisième année. Son intention n’était alors pas de prendre l’AED par surprise, mais bien de profiter de l’occasion pour discuter en grand groupe de la valeur de cette proposition.
On pourra débattre longtemps de la procédure, du manque de préparation de la proposition du CEFDUM, mais ce qui laisse un goût amer dans la bouche de plusieurs, c’est l’attitude adoptée dans les échanges. À plusieurs reprises, le CVSG, fier gardien du décorum, a dû intervenir pour rétablir le respect, pour freiner des attaques personnelles, pour demander au CEFDUM de cesser de faire des procès d’intention et même pour demander au trésorier de s'asseoir, de cesser de parler sans attendre son tour. Quant à cette dernière intervention, on peut comprendre que la situation était stressante, on peut comprendre l’inconfort qui vient avec des semaines de travail qui sont remises en question publiquement et soudainement, mais ultimement, les membres éluᐧeᐧs de notre association ont la mission première de nous écouter. Leur poste, en AG, est indissociable de leur personne, et ce comportement était pour le moins regrettable.
C’est donc sur ce ton de discorde que le quorum fut perdu, et le vote du budget mis sur la glace. Rassurons-nous, l’AED et le CEFDUM sont composés de gens de solutions; cette situation sera rapidement réglée, et tousᐧtes vivront heureuxᐧeuses et factureront beaucoup de billables.