Le Maroc continuera de vous surprendre

Mais commençons par la genèse, histoire de ne pas être hors jeu. C’est à la fin d’octobre que les séries d’entraînement ont débuté. Chaque lundi soir, nous nous réunissions pour des échauffements intensifs menés par nos coachs chevronnés, consacrant des heures à l'affinement de nos compétences diplomatiques. Ces moments d’échanges passionnés et de travail acharné ont forgé notre cohésion et renforcé notre détermination. Comme disait notre attaquant Manu : « UdeM, let's get them! ». Ce n’était pas qu’une simple phrase lancée à la volée : l’Université de Montréal a une fois de plus brillé sur la scène internationale. Une victoire éclatante, preuve de son excellence académique. Zilal Arouna, Pauline Mercenier, Océane Mouton, Clara Vichard, Lyna Zorgane ont soulevé ensemble six trophées lors de la 23ᵉ édition de l’International Model African Union Conference. Ce tournoi, organisé par l'Université Howard en partenariat avec la Mission de l'Union africaine à Washington, offre une immersion unique dans les bases du jeu de la diplomatie africaine.

Parlant de jeu, lors de ma simulation dans le Comité Démocratie, Gouvernance et Droits Humains, nous avons longuement abordé la question de l'investissement dans des programmes de leadership pour les jeunes. Le débat fut si animé que des prolongations s’enchaînèrent afin de répondre à cette question cruciale : faut-il investir dans la jeunesse ou, au contraire, se préoccuper du présent en s'engageant à réparer les crises actuelles ? Pour certain.e.s, c’était une manière efficace de gagner du terrain, tandis que d’autres estimaient qu’on devrait d’abord résoudre les urgences du moment avant de penser à l’avenir. Aujourd’hui, le contexte politique mondial sort vraiment du filet. Des pratiques gouvernementales douteuses et instables nous donnent plutôt envie de miser sur les générations futures pour ne pas sombrer dans la désinvolture.

Si on sort du contexte africain, l'exemple du président américain est criant : il est clair que Donald Trump mériterait plusieurs cartons rouges pour ses décrets déraisonnables et tout ce qui s'ensuit ! ici, au Canada, notre premier ministre, ayant perdu pied à force de faux pas, a fini par enjamber la sortie du Parlement, sa chaise entre les mains et un sourire aux lèvres. Sans oublier le gouvernement israélien qui, après avoir mis le feu aux poudres dans la bande de Gaza, coupe désormais l’électricité, tentant encore d’éteindre leurs lumières. Oui, je vous confirme que l'actualité est effrayante, mais revenons à notre simulation. Les premières heures s’étaient écoulées et nous approchions la mi-temps férocement. Les programmes de leadership pour les jeunes avaient été proposés par plusieurs d’entre nous comme une mesure tangible, dans l’ambition de faire taire les armes en Afrique. Chose qui fut rétorquée par un État membre, qualifiant l’idée de secondaire. Il est essentiel de mettre en place des systèmes de régulation des armes, mais il faut aussi préalablement prendre en main l'éducation de ceux et celles qui finissent tristement par avoir l'arme en main. Voilà ce que le Maroc répondit.

Malgré les nombreuses heures passées à réviser des plans de match, on réalise très vite que le jeu se dessine réellement sur le terrain. Le trajet qu’emprunte la balle est imprévisible. Mais c’est bien la beauté de la chose. S’immerger complètement dans l’argumentaire, gribouiller sur notre calepin une réplique ou un discours qui rallie les joueur.se.s lorsque ceux-ci se divisent. Faire vibrer la salle grâce à nos paroles que l’on acclame au nom de notre propre pays. C’est certainement une expérience que je chérirai à jamais.

Comme le Maroc en 2022 à Washington, je n’ai pas non plus soulevé la coupe, mais je ne suis certainement pas repartie les mains vides. J’ai appris, grandi et partagé des moments incroyables avec une équipe légendaire. je suis heureuse et fière d’avoir participé à cette expérience enrichissante. Fière de cette jeune fille qui a souvent été laissée sur le banc de touche parce qu’elle ouvrait trop la bouche. C’est grâce à elle que je suis ici. Si je pouvais, je lui dirais que malgré les tentatives de tacle, la balle est dans son camp; qu’à l’avenir, son élocution ne sera plus ridiculisée, mais exclamée; qu’elle a même réussi à faire de la poésie en anglais; que plusieurs de ses rêves se concrétisent de jour en jour grâce à sa résilience; que sa quête ne fait que commencer; car, oui, le Maroc continuera de vous surprendre.

Équipe : Université de Montréal

Entraineur : Fatoumata Bah, Nina Luttringer, Arslane-Rostom Lamouti et Wiam Mokhtari,

Joueurs : Zilal Arouna, Pauline Mercenier, Océane Mouton, Clara Vichard, Lyna Zorgane, Aya Alaoui ismaili, Abdourahmane Cisse, Manuel Couralet, Yassine Khoudri, Gerardo Daniel Molina Rodriguez et Nelia Saiah.