L’heure est grave au Liban : le Canada doit tendre la main, et vite
Auteur·e·s
Saf Hakawati, Étudiant au baccalauréat en droit, Université de Montréal
B.A. Science politique, Université McGill
Félix Goulet-Tinaoui, Candidat à la maîtrise en science politique, Université de Montréal
B.A. Science politique et philosophie, Université de Montréal
Alexandrine Beauvais Lamoureux, Candidate à la maîtrise en santé publique, Université de Montréal
B.A. Relations internationales et droit international, Université du Québec à Montréal
Tristan Bilodeau, Étudiant au baccalauréat en droit, Université de Montréal
B.A. Science politique et philosophie, Université de Montréal
Publié le :
29 octobre 2024
Ce texte est un travail collectif amorcé le 24 septembre 2024, à la suite des premières attaques d’Israël contre le Liban. Le lendemain, après son écriture, près de 80 étudiant.es de domaines différents ont signé cette lettre. Elle a été ajustée pour mettre l’information nécessaire à jour; nous n'avons pas ajouté les noms des signataires puisqu’en faire le suivi était trop complexe logistiquement. Veuillez noter, finalement, que la demande faite à la fin de cet article a été partiellement remplie par le gouvernement canadien. Il n’en demeure pas moins que l’inaction d’Ottawa devrait être condamnée puisque les atrocités de la guerre que subissent actuellement les peuples du Proche-Orient ont trop duré.
Nos compatriotes coincés au Liban doivent être traités comme égaux devant et sous le régime de la loi ; ils ont droit à une protection égale, sans discrimination fondée sur la race, l'origine nationale ou ethnique.
Nous sommes la première génération à avoir accès aux images d’une guerre en temps réel, juste au bout de nos doigts.
À l’heure actuelle, le Proche-Orient – terre d’oliviers, symboles de paix et de solidarité –, là où le coeur de tant de nos frères et sœurs québécois.es est ancré; l’endroit qu’ils désignent comme maison, est une fois de plus le théâtre de tragédies, entendues stricto sensu. Ces dernières semaines ont été la période la plus meurtrière au Liban depuis la guerre civile. Les forces israéliennes ont tué plus de 2000 citoyen.nes libanais.es en quelques semaines, soit déjà près du double des morts occasionnés lors de la dernière guerre israélo-libanaise de 2006.
Il est impératif d’intervenir avant qu’il ne soit trop tard. En continuant d’acheminer son soutien à l’armée israélienne, le Canada facilite le massacre dont nous sommes témoins. Incluant Gaza et la Cisjordanie, il s’agit du troisième front de bataille brutal que le gouvernement de Netanyahu a ouvert contre ses voisins en moins d’un an. Malgré la violence des scènes qui se déferlent sur nos écrans, le gouvernement canadien continue d’invoquer le « droit d'Israël à se défendre ». Toutefois, le principe de proportionnalité, fondamental en droit international, a été largement bafoué.
En effet, le Canada ferme les yeux sur des violations majeures du droit international, tel que le génocide israélien à Gaza et la cynique « attaque par téléavertisseurs » au Liban la semaine dernière. Cette guerre a pris des proportions qui donnent mauvais présage : l’entrée de l’État hébreu dans une guerre totale. Le Canada ne peut s’abstenir d’agir; prétendre ne pas avoir de mains reviendrait plutôt à les salir.
Par ailleurs, rappelons au gouvernement fédéral qu'il y a plus de 45 000 Canadiens au Liban, dont des milliers de Québécois. Notre amitié profonde avec ce peuple est à la fondation de notre lettre d’appel à l’action pour le gouvernement canadien. Nos compatriotes coincés au Liban doivent être traités comme égaux devant et sous le régime de la loi ; ils ont droit à une protection égale, sans discrimination fondée sur la race, l'origine nationale ou ethnique. Cette protection a été donnée aux Canadiens en Israël en 2023. Il est donc de l'ordre de la responsabilité gouvernementale – et collective – de protéger les Canadiens au Liban. Il incombe au Canada de secourir ses ayants droit en les évacuant, eux qui pâtissent au cœur de ces tourments géopolitiques.
Notre intuition nous porte à croire que le gouvernement libéral profiterait des yeux rivés sur l’élection américaine pour jouer l’innocent. Alors que les grandes organisations internationales accusent l’État hébreu de crimes de guerre, une invasion militaire du Liban par l’armée israélienne semble toujours à l’horizon. Comme en 2006, l’objectif serait assurément de mettre à mal l’existence même du Hezbollah, transformant alors le peuple libanais en victimes de dommages collatéraux, en chair à canon. La fenêtre d’action du Canada pourrait se fermer du jour au lendemain.
Au-delà du droit des citoyen.nes canadien.nes à la sécurité, il est du devoir du Canada de prendre position ; au-delà des questions juridiques sous-jacentes, la situation de nos confrères et consoeurs libanais.es devrait mobiliser notre humanité. La fameuse résilience libanaise pourrait connaître sa limite. Voilà pourquoi nous exhortons le gouvernement canadien à rapatrier immédiatement ses citoyen.nes du Liban et à condamner les atrocités que nous voyons sur nos écrans tous les jours depuis plus d’un an. La situation dure depuis trop longtemps. Il est enfin l’heure d’y mettre fin.