Dans la vulnérabilité se trouve une force incroyable
Auteur·e·s
Heidi Langlois, pair-aidante au PADUM
Publié le :
10 mars 2022
La santé mentale n’aura jamais été autant d’actualité que depuis le 13 mars 2020, jour où tout a chamboulé. Je vais assumer que cette date vous évoque un souvenir précis, sans toutefois le ramener ici – je crois que nous essayons tous de l’oublier. Depuis cette fameuse date, les articles et les études s’accumulent et exposent au grand jour tous les effets néfastes du confinement sur la santé mentale...
D’abord, c’est important de ne pas t’oublier pour exceller. Rappelle-toi que le succès a bien meilleur goût lorsqu’on est en santé, tant mentale que physique.
On ne peut toutefois parler de santé mentale sans être contraint d’admettre que le milieu juridique souffrait déjà de nombreux problèmes à cet égard, et ce, bien avant l’arrivée du virus COVID-19. En effet, en 2019, un article publié par Radio-Canada porte un titre assez inquiétant à cet effet : « Plus de 40 % des avocats du Québec souffriraient de détresse psychologique. (1) » Je n’ose même pas m’imaginer ce pourcentage trois ans et une pandémie plus tard.
Les étudiantᐧeᐧs en droit ne sont pas épargnéᐧeᐧs de cette problématique, ce que confirme une étude de l’Association du Barreau (2). Pour ma part, je ne fus malheureusement pas non plus épargnée. En effet, je termine mon baccalauréat dans quelques mois; déjà presque trois ans se sont écoulés depuis mon entrée dans le monde universitaire qui s’est déroulée tout sauf comment je l’imaginais. Ainsi, avec le recul et le cheminement que j’ai fait au fil de ces années, j’aimerais aujourd’hui pouvoir m’adresser à Heidi qui débute son parcours et lui dire ce qui suit :
« D’abord, c’est important de ne pas t’oublier pour exceller. Rappelle-toi que le succès a bien meilleur goût lorsqu’on est en santé, tant mentale que physique. »
Dans le même ordre d’idées, une mauvaise note ou une mauvaise session n’est pas synonyme de catastrophe. Le monde est tourmenté par des événements qui le sont réellement et tes notes n’en font pas partie. Une mauvaise note ou une mauvaise session n’est pas synonyme de la fin de ta carrière (qui n’a même pas commencé d’ailleurs). Surtout, une mauvaise note ou une mauvaise session n’est pas le reflet de qui tu es et de ta valeur. Toi qui as toujours été première de classe, tu me roulerais certainement les yeux à la suite de ce message. Trois ans plus tard, je peux t’affirmer que le stress et l’angoisse que tu te fais à propos de tes notes sont pires que ce que c’est vraiment. Je sais, ces premiers résultats universitaires sont les pires que tu n’as jamais eus de ton parcours académique et c’est un coup dur à digérer. Pourtant, avec du recul, je t’avoue que les nombreuses crises d’anxiété avant un examen n’ont pas valu la peine. Je sais que c’est plus difficile à faire qu’à dire, mais vas prendre des respirations, marcher, t’entraîner et te changer les idées comme tu l’entends, mais non pas de sacrifier ton équilibre de vie en dépit de ta santé mentale. Bref, prends soin de toi, avant de te laisser aller dans un tourbillon d’anxiété. »
Ces paroles, j’aurais aimé les entendre à mon arrivée à la Faculté. Des symptômes d’anxiété accumulés ne sont pas à minimiser et encore moins à ignorer. Pourtant, il n’est pas rare de côtoyer des étudiantᐧeᐧs à la Faculté qui racontent qu’ils ont étudié toute la nuit, qu’ils ne mangent plus pendant la période d’examens ou encore que s’ils n’ont pas un A, c’est dramatique. Ce genre de discours est, de mon expérience, plus fréquent que d’entendre comment une soirée entre amis ou une sortie en plein air permet de ventiler et de mieux étudier par la suite. C’est pourquoi je dirais donc à Heidi qui vient de débuter l’université que de prendre une pause d’étude n’est pas une perte de temps, mais plutôt un investissement, car la santé mentale devrait faire partie du plan d’étude.
Bref, cette étape difficile qu’a été mon entrée à la Faculté m’a certainement fait grandir. C’est vraiment cliché, mais c’est la réalité. Confrontée à l’anxiété quotidiennement, particulièrement à de l’anxiété de performance, je n’ai pas eu d’autres choix que de m’outiller, heureusement pour moi, non pas pour la faire disparaître (ce qui est impossible), mais pour cohabiter avec celle-ci sainement. C’est cela qui m’a motivé à m’impliquer au sein du PADUM; promouvoir activement un équilibre de vie sain et être une personne-ressource à l’image de ceux et celles qui m’ont aidé à me sortir de ce tourbillon d’anxiété est pour moi une grande fierté. Parler ouvertement de santé mentale en pouvant se confier lorsqu’on va moins bien a certainement été l’un des éléments des plus libérateurs pour moi et c’est exactement ce que représente le PADUM à mes yeux. Dans la vulnérabilité se trouve une force incroyable. Bien évidemment, il est facile pour moi de partager tout cela ainsi avec du recul, mais si je peux rejoindre ne serait-ce qu’une personne, qui, comme moi, a eu un début universitaire difficile à travers ce texte, ce sera mission accomplie.
Sources citées:
La Presse canadienne, « Plus de 40% des avocats du Québec souffriraient de détresse psychologique », Radio-Canada, 13 juin 2019, en ligne : https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1183178/etude-avocats-detresse-psychologique-universite-sherbrooke.
Carolynne BURKHOLER-JAMES, « Traiter de la santé mentale à la faculté de droit », Association du Barreau Canadien, 16 février 2022, en ligne : https://www.nationalmagazine.ca/fr-ca/articles/the-practice/young-lawyers/2022/addressing-mental-health-in-law-school.