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Cinquième anniversaire du PADUM : entrevue avec Julie Biron

Auteur·e·s

Thomas Doré

Publié le :

8 mars 2022

En cette Semaine du bien-être, et dans le but de souligner le cinquième anniversaire du PADUM, je me suis entretenu avec la professeure Julie Biron, dont le désir de venir en aide aux étudiant·e·s est à l’origine de la création des Pairᐧeᐧs aidantᐧeᐧs en droit de l’Université de Montréal. Plongeons dans le passé, le présent et le futur de ce programme d’entraide en santé mentale qui depuis déjà cinq ans offre un service grandement apprécié des étudiant·e·s de la Faculté.

Bref, à la fin de la journée je suis sortie de mon bureau, je suis allée voir les membres de la direction puis je leur ai dit qu’on est en train de voir un changement, que les étudiant·e·s ne vont pas bien puis il faut agir. - Julie Biron

Nous en avons tousᐧtes entendu parler, mais qu’est-ce que c’est le PADUM? « Le PADUM, à son origine, visait à former un groupe de pairᐧeᐧs, d’étudiant·e·s, qui étaient formé·e·s par des psychologues pour écouter les étudiant·e·s qui avaient des problèmes et qui avaient envie d’en discuter, puis pour les référer vers les ressources qui pouvaient leur être utiles pour résoudre les problèmes auxquels ils faisaient face. Ça, c’est l’objectif initial », explique Julie Biron. La mission du PADUM a toutefois évolué au fil des années : « Ce que c’est devenu, c’est un groupe qui a démocratisé et qui est venu parler de questions de santé mentale, et qui est venu rappeler certaines évidences, c'est-à-dire que tout le monde a des situations de stress auxquelles il est confronté, qu’on fait tous·tes face à des situations similaires, et que l’issue de tout ça, pour s’en sortir en étant sain·e d’esprit, c’est de s’en parler. [...] Bref, c’est ça aussi le PADUM, c’est rendre la question de la santé mentale plus ouverte, plus transparente, plus facile à discuter, tant avec les professeur·e·s, les professionnel·le·s de la Faculté, qu’avec les étudiant·e·s. »


Le PADUM contribue donc à un mouvement plus large de conscientisation du milieu universitaire aux enjeux de santé mentale, lesquels, on le réalise plus facilement aujourd’hui, sont effectivement omniprésents dans la communauté étudiante. Il n’en a toutefois pas toujours été ainsi : « À l’époque où moi j’ai fait mon baccalauréat, on ne parlait pas de questions de santé mentale, puis on n'était pas dans cette réflexion sur l’ouverture par rapport aux problèmes que tout le monde vivait. Si quelqu’un était arrivé avec cette idée-là à l’époque où moi j’ai fait mon baccalauréat, ça aurait été utile parce que la détresse était la même, c’est juste que je pense que personne n’aurait eu cette ouverture-là pour aller parler de ces enjeux. » Un jour, Julie Biron en a eu assez du tabou et de l’inaction autour de l’enjeu de plus en plus évident de la détresse des étudiant·e·s : « C’est tout simplement une journée où je répondais à des questions dans mon bureau en lien avec le droit des sociétés par actions, puis un après l’autre les étudiant·e·s rentraient puis finissaient par me parler de leurs problèmes personnels, des situations difficiles qu’ils vivent, puis ils ont pratiquement vidé ma boîte de Kleenex. Bref, à la fin de la journée je suis sortie de mon bureau, je suis allée voir les membres de la direction puis je leur ai dit qu’on est en train de voir un changement, que les étudiant·e·s ne vont pas bien puis il faut agir. »


Toutefois, Julie Biron n’a pas eu le succès escompté auprès de la direction : « On m’a dit qu'on n'avait pas les moyens, qu’on n'avait pas de budget pour ça puis nous, qu’on ne peut rien faire [au niveau de la direction]. » Les membres de la direction de l’époque invitent néanmoins Julie Biron à agir si elle le souhaite, ce qu’elle fait sans attendre. Convaincue qu’elle ne pouvait pas atteindre ses objectifs seule, c’est donc vers l’AED que Julie Biron s’est tournée, où des exécutants ont accueilli son projet avec enthousiasme. Alex Vandal-Milette, qui occupait celui de vice-président aux affaires académiques, et Simon Telles, qui occupait le poste de président, se sont effectivement montrés sensibles au cri du cœur de Julie Biron. Ce dernier deviendra même l’un des fondateurs du PADUM, avec Laurence Angers-Routhier, une autre étudiante motivée par le désir de faire un changement positif dans sa communauté, et Julie Biron elle-même. C’est ainsi qu’en 2016 et 2017, le PADUM a enfin vu le jour : « On était Laurence, Simon et moi, puis on a fait des pressions pour avoir l’aide du CSCP (Centre de santé et de consultation psychologique) pour créer le PADUM. »


En guise de témoin de la normalisation progressive de ces enjeux de santé mentale, Julie Biron offre l’exemple de la soirée d’accueil des étudiant·e·s de première année qui, au fil des années, s’est métamorphosée pour laisser place à une vision des études en droit plus bienveillante et sensible aux réalités des étudiant·e·s : « Quand j’ai commencé le PADUM avec Laurence et Simon, l’AED, grâce à Simon, m’a invitée à faire partie de la soirée d’accueil. C’est la première fois qu’il y avait un professeur qui participait à la soirée d'accueil. La première année, il n’y avait pas de doyen. La deuxième année, le doyen était là, mais il est resté quinze minutes, puis il est parti. Là maintenant, toute l’équipe de direction est là, la doyenne est présente : ça aussi c’est ce qui a changé. Il y a cette prise de contact-là dès l’entrée des étudiants. [...] J’ai pleuré à la soirée d’accueil [cette année] parce que tout le monde parlait de questions de santé mentale, tout le monde faisait preuve de bienveillance, c’était vraiment la concrétisation d’un changement qui avait été enclenché y’a pas si longtemps que ça. »


En conclusion, beaucoup de choses ont changé depuis la création du PADUM il y a cinq ans, de l’attitude des professeur·e·s et de la direction à l’égard de la santé mentale des étudiant·e·s à l’aisance de ces derniers à parler et à nommer leurs problèmes, et ce, bien que la détresse psychologique soit toujours présente dans une certaine mesure parmi la communauté étudiante. Julie Biron formule un souhait autant simple que surprenant pour le futur du PADUM : « Honnêtement, j’aimerais que le PADUM devienne inutile, parce qu’on aurait d’autres moyens à la Faculté qui permettraient d’atteindre les mêmes objectifs. Je ne sais pas si ça va arriver parce qu’il y a une question budgétaire, mais ouais, ce que je souhaite, c’est que le PADUM soit inutile. » La professeure imagine une faculté où des professionnel·le·s bien outilléᐧeᐧs et forméᐧeᐧs peuvent répondre aux besoins en santé mentale des étudiant·e·s de la Faculté : « La Faculté aurait engagé une psychologue à temps partiel, par exemple, puis elle prendrait la peine d’organiser des conférences pour parler de différentes situations, pour transmettre de l’information, puis c’est elle qui viendrait parler aux gens à la soirée d’accueil à ma place, parce qu’elle aurait beaucoup plus de crédibilité que moi comme professeure en droit des affaires, qui n'a pas de formation en psychologie même si j’ai un intérêt pour la chose. »


***


Julie Biron et moi avons poursuivi la discussion off the record pendant quelques minutes après l’entrevue. On a jasé de sa vie d’étudiante et de stagiaire en droit puis du début de sa carrière d’avocate et, éventuellement, de chargée de cours puis de professeure.


Je retiens de ma discussion avec elle sa grande humilité, son impressionnante lucidité face à la réalité des étudiant·e·s et son audace. C’est donc après avoir entendu ses paroles douces, fortes et toujours intelligentes que j’ai compris pourquoi des cohortes successives d’étudiant·e·s sont allées et vont toujours régulièrement vider la boîte de mouchoirs de son bureau. Julie Biron est, à l’image du PADUM qu’elle et son équipe ont créé, tout simplement… bienveillante.


Merci à vous, professeure, et à tousᐧtes les étudiant·e·s et professionnel·le·s qui, depuis maintenant cinq ans, permettent au PADUM d’atteindre ses nobles objectifs et joyeuse Semaine du bien-être à tousᐧtes les étudiant·e·s de la Faculté. Prenons soin de nous.

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