Attachez votre ceinture
Auteur·e·s
Aya Alaoui Ismaili
Publié le :
22 août 2024
Dans quelques instants, vous marquerez vos premiers pas sur notre campus. Attachez votre ceinture, cette aventure dont vous avez tant rêvé (ou appréhendé) s’apprête à commencer. Cela dit, un rituel d’initiation se doit d’être complété avant d’entamer votre parcours à la Faculté de droit de l’Université de Montréal. Non, détrompez-vous, je ne fais pas allusion à la semaine d’activités et de compétitions acharnées, proclamant fièrement votre lettre colorée nouvellement attitrée. Mon discours renvoie plutôt à l’examen d’introduction qui, conformément à la rumeur, n’aura probablement rien à voir avec le reste de votre cursus. Toutefois, les avis diffèrent. Certains l’ayant déjà passé vous assurerons de ne pas vous en faire, alors que d’autres vous aviseront d’y faire gare. Ainsi, vous vous demandez sûrement que faire ? Oui, c’est bien cela, votre vue ne vous fait pas défaut. Plus d’une vingtaine de capsules compressées en neuf séances étendues sur sept piètres jours. Néanmoins, plusieurs qualifient de mémorable cette semaine initiale, où l’on a l’occasion de tisser des liens avec ceux qui partageront plus tard vos nuits d’étude bien caféinées. Enfin, une étape à la fois! Ne vous en tracassez pas aujourd’hui, mon but n’est pas de vous effrayer. Car une chose est sûre, la route ne fait que commencer.
« J’ai échoué encore et encore et encore au cours de ma vie, et c’est pourquoi j’ai autant réussi »
Quand on y réfléchit, DRT1001 symbolise l’arrêt à la station d’essence avant d’entamer votre trajet. Ne vous méprenez pas, la cérémonie de graduation n’est pas la destination finale. En effet, la remise des diplômes n’est qu’un simple virage à droite vers une autoroute avoisinante que vous longerez jusqu’à ce que le moteur de votre véhicule vous lâche. Vous êtes là aujourd’hui, avec déjà plusieurs kilomètres de parcourus : que vous ayez emprunté la voie de gauche à toute allure ou que vous vous soyez perdu en chemin, distrait par le paysage qui défile, peu importe les détours empruntés, vous y êtes. Plus important encore, vous y avez cru. Croire est une notion que plusieurs renvoient à l’optimisme, cette ceinture de sécurité qui vous empêche d’être éjecté de votre véhicule lorsque vous rencontrez un obstacle. C’est dans cette pensée philosophique que je me suis intéressée au pourquoi. Pourquoi certain.es attachent-iels leur ceinture alors que d’autres démarrant à toute allure sans mesure de sécurité prennent le risque de ne pas pouvoir finir la route à l’issue de collision ?
L’optimisme est un atout qui n’est malheureusement pas donné à tous. Mais alors, d’où émerge-t-il? Comment certains parviennent-iels à maintenir une confiance en l’avenue du beau temps après la tempête ? Un état d’esprit presque utopique qui visualise encore la réussite à travers les échecs. Une personne qui lève son verre à moitié plein et trinque à l’avenir. Avec raison, j’ai envie de dire, lorsque l’on analyse les données d’une étude démontrant que les optimistes sont plus susceptibles de vivre plus longtemps. Mais d’où leur vient cette perception positive? Se construit-elle au fil de leurs échecs ou de leurs réussites? Faut-il y croire pour le voir ou le voir pour y croire? L’emblématique dilemme de la poule et de l’œuf.
À cet égard, Yannick Delorme, un thérapeute en relation d’aide, vous explique dans l’un de ses articles que l’échec serait comme un catalyseur de réussite consolidant la résilience. L’auteur nous illustre d’ailleurs sa pensée au travers des mots du célèbre joueur de basket-ball, Michael Jordan: « J’ai échoué encore et encore et encore au cours de ma vie, et c’est pourquoi j’ai autant réussi ». Visualisant l’échec comme une opportunité d’apprentissage qui nous amènerait à surmonter la peur de son arrivée. Mieux encore, nos échecs précédents nous donneraient les outils pour faire face aux imprévus subséquents. Dites-moi, si vous avez une crevasse, allez-vous jeter vos clés à terre et abandonner le véhicule sur la route ou simplement appeler une dépanneuse? Cela dit, une question demeure. Comment visualiser la réussite si elle nous est inconnue? Dans l’article « Les applications du sentiment d’efficacité personnelle », l’auteur, Jacques Lecompte, formule l’idée qu’une personne qui s’estime incapable de réussir enfoncera son pied sur le frein avant même de démarrer le moteur. Jacques Lecomte décortique ce sentiment en quatre principes, notamment, celui des expériences actives de maîtrise, soit les succès de la personne. Pour que puisse émerger le regard optimiste, l’échec et la réussite doivent coexister. Encore une fois, faut-il y croire pour le voir ou le voir pour y croire ?
Vous voulez mon avis, après maintes réflexions et lectures? Nul besoin de savoir. Le pourquoi n’est que futilité devant le comment. L’optimiste en moi vous dirait qu’il n’est encore jamais trop tard pour en devenir un ou une. C’est ainsi que mon regard s’est tourné vers un livre fort enrichissant écrit par Shawn Achor, un pionnier de la psychologie positive. Au travers des 296 pages que je me suis fait le plaisir de lire au soleil, Choisir l’optimisme énumère diverses astuces qui bénéficieraient grandement à votre parcours. J’ai donc jugé judicieux de vous en résumer les grandes lignes pour m’assurer que mes lecteurs attachent bien leur ceinture de sécurité. D’ailleurs, en tant qu’étudiante en droit, je me dois de vous informer que l’article 250 du Code de la sécurité routière nous y contraint.
L’auteur explique que ses travaux de recherche, jumelés aux résultats issus des laboratoires de psychologie positive développés aux quatre coins du monde, lui ont permis de déceler cinq étapes qui permettraient de devenir un.e génie positif.ve capable d’établir une réalité positive et en même temps plausible. Ces génies positif.ves vont au-delà du verre à moitié plein ou vide et regardent plutôt la carafe d’eau posée sur la table, pleine de possibilités. À vous de vous servir.
Dans son premier chapitre intitulé « L’architecture de la réalité », l’auteur débute avec l’étape suivante : choisir la réalité la plus précieuse. Nous incitant ainsi à refaçonner notre actualité à notre avantage, notamment en transformant le stress en atout. Revenons à DRT1001 : vous êtes sans doute angoissés. Rédiger un examen final avant même d’avoir eu le temps de connaître le prix du café le moins cher de la Faculté. Face au défi, plusieurs tenteront de vous rassurer en vous disant sans doute : ne stressez pas! Discours qui provoque ironiquement en nous l’essor d’un stress paralysant. L’auteur vous conseillerait plutôt de repenser le stress en vous focalisant sur sa signification. Redirigez cette énergie pour en maximiser les effets secondaires positifs. Cette première étape vous tient à cœur, vous êtes conscients que sans détour vers la station d’essence, votre véhicule aura du mal à parcourir les premiers kilomètres. Alors, lâchez le frein à main et foncez.
Le second chapitre, intitulé « La cartographie mentale », nous propose à présent de tracer notre itinéraire vers le succès en dressant une liste de nos marqueurs de sens. Vous rappelez-vous de l’époque où vos parents vous proposaient avec insistance de compter les voitures rouges pour faire taire l’abominable « On est bientôt arrivés ? ». Nos esprits, à présent concentrés sur ce jeu, trouvaient une joie à ne pas en manquer une, détournant ainsi complètement notre esprit de l’attente interminable. Dans la même lignée, l’auteur explique qu’il faut déceler nos divers intérêts et éléments gratifiants afin que l’itinéraire du succès devienne une chasse au trésor. Libre à vous de trouver vos centres d’intérêt. En tant que mordue d’écriture à l’imagination débordante, pour moi, m’impliquer au sein du journal étudiant représente un marqueur de sens crucial que j’épingle joliment sur ma carte routière.
La troisième compétence, concernant l’identification de nos points X, nous invite à berner notre cerveau afin d’en retirer les bénéfices des accélérateurs mentaux. L’auteur propose de donner à votre cerveau une longueur d’avance sur votre trajectoire. Vous venez de démarrer et l’embouteillage est à son comble, toutefois vous êtes à présent convaincu que cela fait déjà 20 minutes que vous êtes sur la route et qu’un 20 minutes de plus est surmontable. Shawn Achor justifie cette ruse en interpellant les derniers mètres parcourus par les marathonien.nes complètement à bout de souffle. Ces coureurs sont connu.es pour maintenir un rythme assez stable, toutefois cette impression d’être si proche du but crée inconsciemment une envie de redoubler d’efforts. Revenons à DRT1001. Vous venez de commencer à lire une décision importante et les minutes s’envolent. Conditionnez votre cerveau à croire que vous êtes à mi-chemin. Vous n’êtes pas à la page 1 sur 50, mais plutôt à la page 50 sur 100. Faites-moi confiance, ce sont les pages qui s’envoleront.
Le chapitre suivant nous invite à supprimer le bruit négatif. Actionnez vos essuie-glaces pour vous libérer de la vue des débris récoltés. Le début de cet article vous a peut-être semblé décourageant, mais permettez-moi de vous rappeler que tout n’est qu’une question de réglage d’angle. Reprenez la lecture de mon article à la première page. Certains regards futés ont probablement déjà décelé le message caché entre les lettres mises en gras. Le psychologue positif utilise cette technique pour illustrer la suppression du bruit négatif. N’écoutez pas ces voix décourageantes ou encore ce syndrome de l’imposteur qui résonne souvent dans nos oreilles. Vous êtes là, vous y avez cru, alors continuez d’y croire.
L’auteur termine avec la Faculté de perception positive en transmettant ces nouveaux acquis autour de vous. Pour lui, il vous est judicieux et bénéfique de faire passer ce message. Égayer notre entourage de positivité accentuerait par le fait même la nôtre. Corrigez-moi si je me trompe, mais je pense bien qu’un article publié dans le journal de la Faculté se faisant lire par ceux qui gagneraient à connaître ces astuces incarne parfaitement les recommandations du psychologue Shawn Achor. Alors, faites vos angles morts, repérez les véhicules qui partagent votre route et partagez ces astuces teintées d’optimisme. Ensemble, vous finirez sans doute par trouver la destination plus vite.
1. Fuschia Sirois, Les optimistes vivent-ils vraiment plus longtemps? Bel âge, Durham University : https://lebelage.ca/entre-nous/psycho/les-optimistes-vivent-ils-vraiment-plus-longtemps/
2. Lecomte, Jacques. Les applications du sentiment d'efficacité personnelle, Savoirs, vol. , no. 5, 2004, pp. 59-90. : https://www.cairn.info/revue-savoirs-2004-5-page-59.htm
3. Delorme, Yannick. 2023. L’échec : Un catalyseur de succès, Apprendre de nos erreurs. Avancer simplement. https://www.avancersimplement.com/lechec/
4. Achor, Shawn. Choisir l’optimisme ; Comment être heureux par mauvais temps. Belfond.